Je prendrai le parti d'évoquer dans cet article le périnée au féminin, messieurs pardonnez-moi... Même s'il a des fonctions très identiques chez l'homme et que son engagement est primordial à bien des égards, je préfère parler de ce que j'ai appris et notre enseignement s'est porté sur le périnée des femmes.
Il est rare d'avoir conscience de l'importance de son périnée avant une première grossesse, à moins peut être d'être jeune pratiquante de yoga. Savoir le localiser, le mobiliser plus ou moins fermement et surtout le relâcher sont des actions essentielles qui assurent certain un confort de vie intime et de vie quotidienne.
Le périnée est un ensemble de muscles "fermant" la base de notre bassin, on l'appelle également le plancher pelvien. Mais cela lui donne à mon sens un côté trop rigide alors que souplesse et adaptation lui vont bien mieux !
Là où le diaphragme opère une liaison vivante entre le thorax et l'abdomen, le diaphragme pelvien agit comme un hamac soutenant les organes du petit bassin.
Hamac musculaire
Ce doux hamac est composé de 2 couches musculaires : une couche superficielle et une couche plus profonde, s'étendant de bas en haut jusqu'au premier tiers de la hauteur du bassin.
Le plan superficiel, le plus bas, assure une liaison longitudinale entre l'avant du bassin (le pubis) et l'arrière du bassin (le coccyx) ainsi que latéralement entre les deux côtés inférieurs du bassin. Ses muscles entourent les différents orifices des organes pelviens : urètre à l'avant, vagin au centre pour la femme et anus à l'arrière.
Le plan profond, plus haut dans le bassin, comporte deux muscles principaux formant une large nappe avec un orifice plus grand à l'avant pour les passages de l'appareil uro-génital et le passage du bébé lors de l'accouchement. C'est essentiellement ce plan qui assure le soutien des organes pelviens.
Fonctions et désagréments
Le bon fonctionnement de ces deux plans dans le sens de la tonicité mais aussi du relâchement permet d'assurer correctement la continence urinaire et fécale, l'adaptabilité vis à vis de ce qui doit sortir (dont le bébé) et, lors de l'échange sexuel, ce qui rentre.
Un périnée trop lâche rend tous ces échanges naturels hasardeux : incontinences plus ou moins gênantes, peu de sensations lors de l'échange amoureux car peu de contacts. Cette hypotonie peut également engendrer une instabilité des viscères jusqu'à la descente d'organes (prolapsus). Il sera nécessaire de rechercher le renforcement musculaire pour éviter tout cela et surtout de se faire accompagner si les petits inconvénients laissent place à une vraie pathologie.
Certains désagréments sont aussi dus à contrario à un périnée trop tonique. Les muscles hypertendus rendent alors les rapports intimes douloureux ou impossibles et le passage du bébé lors de l'accouchement est difficile. Un travail dans le sens de la décontraction et de l'assouplissement sera nécessaire.
Prendre conscience de son périnée
Petits rappels utiles pour se repérer dans la structure osseuse du bassin :
- La partie palpable à l'avant du bassin juste au-dessus du sexe tout en bas du ventre est le pubis.
- La partie que l'on sent à l'arrière du bassin au dessus du sillon inter-fessier est le sacrum.
- Tout en bas du sacrum se trouve le coccyx.
- Si l'on palpe la partie osseuse sous les fesses, on touche les ischions.
NB : on les sent facilement si l'on s'assied sur les fesses avec les genoux fléchis et les pieds au sol, une main sur chaque genou et que l'on s'appuie alternativement sur une fesse puis sur l'autre.
N'hésitez pas, explorez, tâtez, et figurez-vous par vos doigts ces extrémités du bassin entre lesquelles se situe votre hamac pelvien.
Etendez-vous sur le dos, genoux fléchis pieds à plat sur le sol écartés d'une trentaine de centimètres. Vous pouvez déposer les genoux l'un contre l'autre pour être là tout à fait détendue sans rien à retenir.
Laissez le souffle aller et venir naturellement et ressentez tout ce qui bouge avec la respiration : dans les côtes, dans l'abdomen, dans la taille et dans le dos. Invitez ici autant de souplesse et de liberté que possible dans ces mouvements, relâchez et observez tout simplement pendant quelques minutes.
Visualisez et ressentez la grande masse musculaire du diaphragme reliant la cage thoracique et l'abdomen qui bouge lui aussi comme l'ombrelle de la méduse. Invitez ici une respiration abdominale où vous laissez descendre le souffle dans le ventre. A chaque fois que vous inspirez, l'ombrelle diaphragme s'ouvre et s'aplatit, repoussant le contenu abdominal vers le bas : le ventre se gonfle. Cela crée également une poussée des organes pelvien vers le bas. Laissez faire sans forcer.
Ressentez vous dans le périnée cette légère pression vers l'extérieur ?
Lorsque vous expirez, l'ombrelle diaphragme remonte en "se creusant", les viscères reprennent leur place, libérant ainsi l'abdomen et la poussée vers le bas du plancher pelvien.
Ressentez vous que cette légère pression disparait lorsque vous expirez ?
Ces sensations sont légères et subtiles, vous ne les percevrez peut être pas immédiatement. Poursuivez sur une douzaine de respiration.
Mobiliser son périnée
Toujours dans la même position, vous allez désormais accompagner ce relâchement de la poussée vers le bas durant l'expiration. Laissez-le s'opérer naturellement puis engagez progressivement une action de serrage. Comme si vous souhaitiez rassembler au centre les extrémités basses de votre bassin : le pubis et le coccyx d'avant en arrière et les deux ischions l'un vers l'autre latéralement. Poursuivez cette contraction musculaire vers le centre tout le long de l'expir puis AVANT D'INSPIRER, relâchez complètement le périnée. Inspirez dans la détente et reprenez ainsi une douzaine de respirations.
On ne recherche pas ici à resserrer le plus fortement possible mais on essaye de percevoir la mobilisation concentrique qui rapproche le coccyx du pubis et les deux ischions vers le centre.
Nous mobilisons ici le plan musculaire superficiel du périnée.
Allons plus loin et recherchons désormais l'engagement du plan profond.
Conservez la même posture et, toujours en cours d'expiration, ayez l'intention de remonter la nappe musculaire interne. Imaginez cette nappe se condenser et soulever délicatement les organes pelviens. Le centre du périnée s'élève et remonte également. Poursuivez cette contraction musculaire vers le haut tout le long de l'expir puis AVANT D'INSPIRER, relâchez complètement le périnée. Inspirez dans la détente et reprenez ainsi une douzaine de respirations.
A nouveau ici, recherchez à percevoir la mobilisation vers le haut et l'intérieur du bassin plutôt que d'aller dans la force.
Pratiquer ces exercices vous permettra d'amener de la conscience dans cet espace et une perception plus fine des zones mobilisables du périnée. Vous aurez peut être l'impression au début de tout resserrer sans distinction et de vous "emmêler les pinceaux". C'est normal et comme tout apprentissage il faudra y revenir encore et encore pour que les sensations évoluent mais cela vaut le coup ! Alors accrochez-vous et prenez le temps.
En évoluant, vous pourrez ensuite vous entrainer à resserrer uniquement l'extrémité avant du périnée, comme si vous contractiez exclusivement le sphincter de l'urètre ; même chose au centre autour de l'entrée du vagin puis le sphincter anal... Puis exercez-vous également à contracter "en surface" puis en profondeur.
Et en vous entrainant ainsi à alterner les engagement musculaires (avant, centre et arrière, superficiel et profond...), vous affinerez grandement vos perceptions et gagnerez en contrôle, en confort et en souplesse !
Veillez à toujours bien intégrer des phases relâchement complet entre les phases de contraction.
Pour aller plus loin
Une fois que vous serez bien à l'aise avec les exercices ci-dessus, n'hésitez pas à les refaire dans d'autres postures. Le but étant de ressentir comment se modifient vos perceptions du périnée selon les positions du corps et les différences que cela entraine dans la mobilisation musculaire.
Yoga et périnée
Intégrer la mobilisation du périnée dans la pratique du yoga est courante et on peut la moduler selon ce que l'on recherche tout en l'associant de manières différentes avec le souffle.
Dans les postures tenues en statique un certain temps, elle peut apporter :
- Soutien et force dans les postures intenses (dans les héros, vîrabhadrâsana)
- Renforcement des effets d'ancrage (dans la posture de la chaise, utkatâsana, ou les postures d'équilibre)
- Accompagnement d'un certain "gainage" dans les postures de maintien (dans la planche, kumbhakâsana)
Il peut être également intéressant et même préférable d'engager le périnée dans les postures où s'exerce une pression vers le bas avec les jambes en écart, par exemple dans la posture de la déesse, kâliâsana.
La pratique de MÛLA BANDHA est également très répandue et essentielle en yoga.
Ce bandha (fermeture, ligature) de mûla (la base, la racine) se pratique essentiellement lors des prânâyâma mais également lors du travail postural.
Nous l'évoquerons ici en quelques mots seulement car il fera l'objet d'un article à venir mais il était impensable de ne pas en parler si on évoque le périnée en relation avec le yoga…
Il s'agit d'opérer une contraction du plancher pelvien en combinant l'action de serrage du plan superficiel et la remontée du plan profond, comme si tout se resserrait en un point central que l'on élevait au plus haut dans le bassin.
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